Les enfants viennent du futur (II)
En début d'année, un dimanche alors que je prenais l'air, j'ai reçu un appel de Mlle B. qui de passage à Genève me demandais si elle pouvait venir quelques jours à partir de mardi... Ok,je vérifie et je vous rappelle... C'est d'accord. Le lundi, Mlle B. me rappelle : "Je suis à Millau. S'il n'y a pas de place ce soir au petit château de Roquetaillade, je peux dormir à l'hôtel". Ça se présentait comme une envie pressante. Sur la route de la gare au petit château, B., sans que je la questionne particulièrement, me dit "JE NE VOULAIS PAS VENIR". Bien sûr elle ne parle pas de son voyage pour venir à Millau, je suppose qu'elle parle de sa venue au monde et un léger frisson dans les jambes semble me signaler que nous approchons là d'une vérité profonde. Cela me sera confirmé.
Dans ma jeunesse, il y avait une publicité qui disait : "Un inconnu vous offre des fleurs, c'est l'effet Impulse" [Un déodorant]. Plus tard, il y a eu aussi "Danone, ce qu'il fait à l'intérieur se voit à l'extérieur". Désolé d'être aussi vulgaire, mais voyez comme les publicitaires savent détourner des courants profonds(*) pour nous vendre leur soupe.
Mlle B. est venue à moi. Elle n'avait rien à me vendre, mais elle me confirmait tout naturellement et comme une évidence une intuition dont j'avais repéré peu de traces en ce monde. Cela dit, comme vous le savez chacun vit dans le monde de ses représentations et ce monde vient nous confirmer ces représentations. Malgré tout, depuis, je suis très attentif à ce qui se dit dans la voiture quand j'ai l'occasion d'aller chercher quelqu'un à la gare.
Plusieurs années auparavant, un de mes frères m'avait invité à écouter un entretien de Françoise Dolto diffusé sur France Culture. Un peu pour lui faire plaisir, j'écoute... A la suite de quoi il m'interpelle en me disant : "Alors c'est chouette, hein ? ... Sauf à la fin, là elle déconne vraiment". Justement, je n'avais retenu que la fin. Et que disait-elle ? Elle disait que LES ENFANTS CHOISISSENT LEURS PARENTS.
C'est difficile à comprendre si on se place du point de vue soit disant rationnel qui voudrait que le passé se place avant le présent et le futur.
Il se trouve que je viens de lire dans une revue de haute tenue et à haute teneur scientifique (Télérama n°3155 pour ne rien vous cacher !) que "Le temps n'existe pas. Le monde est fait d'une superposition de réalités que nous ne percevons pas" [...][la mécanique quantique] "nous annonce en effet que l'univers est fait... de tous les possibles et que tous ces possibles se réalisent à la fois !"
A la question : Pourra-t-on un jour voyager dans le temps ? Thibault DAMOUR répond : "Tout à fait. [...] Évidemment c'est difficile à croire car si vous pensez sérieusement qu'il est possible de sauter quasi instantanément de 2010 jusqu'en 2070, cela veut dire que 2070 existe déjà !"***
Encore une confirmation. 2070 existe déjà. En est-il de même pour 2069 et tous les futurs ???
Qu'est ce qui nous intéresse dans cette histoire de futur qui existe déjà ?
Quand une femme désire un enfant et que cet enfant a du mal à paraître, elle peut s'interroger sur son passé, sur son présent, sur le choix de son partenaire etc. Mais songe-t-elle à interroger l'enfant ? Elle pense à satisfaire son désir, ou ils pensent tous deux, elle et son partenaire à agrandir la famille mais ils ne perçoivent pas le trois. Laissez-vous interroger cet enfant qui comme tous les possibles est déjà là.
A-t-il envie de venir ? Est-ce le moment pour lui ? A-t-il envie de moi pour mère ?
Cela peut paraître idiot, mais pourquoi ne pas lui demander son avis ?
Désire-t-on un enfant pour lui ou pour soi ?
Désire-t-il une vie facile ou difficile ? Une famille qui lui posera tellement de difficultés qu'il apprendra beaucoup ou une vie paisible ?
Et pour les femmes, en cas de doute, veut-il de cet homme pour père ? La réciproque est sans doute vraie.
La venue d'un enfant, cela ne concerne pas deux, mais trois. L'enfant est déjà là, même s'il ne vient pas.
Et dans l'autre sens, pour celles et ceux qui ont été enfants et qui sentent ou qui savent "qu'ils n'ont pas été désiré". D'abord, c'est faux. Votre venue au monde était un des possibles, c'est à dire qu'elle a été désirée, même si ce désir n'était pas perçu et encore moins prioritaire aux yeux de vos parents. Ils ne connaissent eux-mêmes qu'une partie de leur propre vérité. "Je ne voulais pas d'enfant mais j'ai oublié de prendre la pilule !". Cela s'appelle un acte réussi !
Mais surtout, n'oubliez pas ce trois. Le tiers n'est pas exclu. Ne vous excluez pas de ce trio. Vous aviez le désir de venir, mais devant la lourdeur de la tâche, devant l'immensité des obstacles et face à la non-rencontre du désir de vos parents, vous avez été tenté de répondre à leur "non-désir" en n'existant pas.
Alors ne vous oubliez pas. N'oubliez pas ce troisième tiers qui faisait peut-être 90% du total.
Ne mettez pas de condition à votre existence : "J'existerai quand mes parents voudront de moi !"... Bien qu'ils soient décédés tous les deux ou très âgés. Ne continuez pas à vous faire souffrir avec cette attente impossible à combler. Reconnaissez votre propre désir. Vous venez du futur. D'un futur qui est déjà largement passé. Et dans ce futur antérieur, une partie de vous-même, la partie qui touche à l'éternité, était d'accord pour venir. Reconnaissez-là et cessez de réclamer ce que vous n'avez pas eu pour vous donner à vous-même au présent amitié, affection, tendresse, bienveillance...
C'est cette amitié avec vous-même, cette reconnaissance qui vous permettra petit à petit de trouver le courage et la force de faire le deuil de tout ce qui semble ne pas vous avoir été donné et que pourtant vous contenez déjà.**
Notes ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
* Swâmi Prajnânpad employait ces termes : "Tout ce qui vient à vous vient comme un défi et une opportunité". C'est différent. Les formules de Swâmi Prajnânpad, La Table Ronde. 2003.
** Bien-entendu le but de cette lettre n'est pas de nier que l'enfant se développe et croît dans le champ du désir de ses deux parents. Et qu'en cas de déficience de celui-ci, les souffrances sont terribles.
"On ne souffre que là où on n'est pas". Comment la conscience d'un enfant pourrait-elle se déployer dans un espace qui ne lui est pas offert ? C'est ainsi qu'il est contraint à se restreindre lui-même en tant qu'être, à nier sa propre existence et à croire qu'il n'y a pas droit.
Cependant l'adulte qui a survécu conserve cette possibilité de situer l'origine de son regard au-delà du désir de ses parents et de reconnaître dans une vision plus large sa participation aux courants de vie qui ont abouti à sa matérialisation, à son incarnation en ce monde.
En lisant la BD en lien ci-dessous, vous pourrez vous représenter chaque incarnation comme une tâche d'encre qui apparaît et disparaît, issue de l'univers implié proposé par Bohm. Vous êtes cela qui plonge ses racines dans l'univers.
*** Si vous vous intéressez à ces questions ardues concernant l'espace et le temps, je vous propose de lire un article facile d'accès de Patrice Van Eersel sous la forme d'une BD dessinée par Manuel Simões pour le journal Actuel en 1982. Cela ne nous rajeunit pas ! Merci aux auteurs à qui je n'ai pas demandé l'autorisation.
Vous la trouverez ici : L'univers implié de David Bohm
Francis Lemaire