Et puis dès l'après midi, pouvoir marcher et respirer enfin…
Il y a des urgences de la vie intérieure pour lesquelles les habituels numéros SOS ne peuvent rien.
C'est aussi Internet qui me conduisit chez Francis. Le premier échange téléphonique confirma ce qui semblait s'imposer à moi. Je ne dirai pas mon corps car je ne savais pas le prendre en compte puisque j'étais sur le point de le mener au bout de ses forces humaines et qu'il s'agissait presque pour moi de reprendre souffle, d'enfin prendre soin de lui… Il me fallait une aide. Il me fallait des bras qui me contiennent, quelqu'un qui m'aide à lâcher tout ce qui me constituait et qui allait me faire mourir pour me permettre de Renaître.
On peut mourir d'une overdose d'exigences que l'on s'est imposé à soi-même pour pallier le vide d'un manque premier originel. Je ne respirais plus, oui il y avait urgence ! Que la carapace s'entrouvre et me permette à nouveau de respirer.
Il y a d'abord la qualité de l'écoute des mots et des silences et ce que Francis attrape au vol pour entrer dans le mystère de ce que nous sommes quand la nuit intérieure est envahissante, noire et sans issue. Ces mots alors prononcés, qui se donnent et qui résonnent encore au détour des jours, m'accompagnent comme des surprises en moi-même. J'entends l'intonation, et le timbre de la voix.
Il y a ensuite cette acceptation de se confier ainsi, de s'abandonner… Il n' y a plus rien à cacher… Faut il qu'une confiance incroyable soit déjà là pour que cela s'accomplisse au-delà de nos volontés rationnelles sans perdre pour autant notre conscience habituelle. C'est consciemment que j'ai franchi ce pas, poussée sans doute par mon instinct de survie, étonnée en moi-même et sachant très sûrement que c'était cela dont j'avais besoin.
Il a fallu faire sauter ces premiers verrous et déclencher des douleurs incroyables… des images et des mots venus de si loin et à peine croyables. Accepter de suivre cette invitation à être dans la sensation, même quand celle-ci étouffe complètement, vous fait hurler ; et peu à peu, Francis me guide, non pour atténuer, mais simplement pour apprendre à vivre en conscience et en totalité. N'être que ce blanc complet dans mon larynx qui ne respire plus. C'est tout.
Et puis dès l'après midi, pouvoir marcher et respirer enfin… Commencement d'un nouveau chemin qui se poursuit… Je suis revenue plusieurs fois, poursuivant cette connaissance intime de sensations oubliées, de ce que mon corps pouvait m'apprendre de moi-même et de mon histoire, moi qui avait organisé toute ma stratégie de défense par la pensée rationnelle et l'action "à corps perdu".
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Comme elle l'indique Eulalie est revenue en séjour puis nous avons continué à correspondre par mail. Cette correspondance est transcrite dans le livre "Le Corps Mémoire, Pour une pédagagie du développement personnel" Tome 1 : Projet de vie, projet de vivre.